Malgré l’avis négatif de la commission d’enquête publique sur le projet de piétonnisation de la rive droite des berges de la Seine à Paris, Anne Hidalgo a répété son intention de mener à bien ce projet. Tout sauf une surprise, au vu du mépris affiché par la mairie de Paris pour les conclusions du rapport d’enquête.
287 contributions, 219 avis négatifs. Le bilan de la commission d’enquête publique pour interdire les voitures sur les berges de la Seine, rive droite, est sans appel. Le projet, qui doit permettre la création d’un circuit piétonnier entre la place de la Bastille et la tour Eiffel, a recueilli un avis défavorable des membres de la commission. Le projet est contesté, tant par les élus d’opposition que par l’association “40 millions d’automobilistes” qui a lancé, avec Sud Radio, une pétition pour demander à la maire de Paris de revenir sur son projet.
Les réserves de la commission d’enquête font l’objet d’un échange questions-réponses avec la mairie. Par courrier interposé, puisque Anne Hidalgo n’a même pas daigné les recevoir pour en discuter avec eux. Un dialogue de sourds tant la mairie, attachée à son projet, rejette les différentes observations formulées, soit en répondant à côté, soit en avançant de curieux chiffres.
Une consultation minimaliste
Premier point de discussion : le périmètre retenu pour l’enquête publique. Plusieurs arrondissements, dirigés par des élus de droite, ont été laissés de côté, tout comme les communes limitrophes. Enfin, pas tout à fait, rectifie la mairie, qui rappelle que “l’information de la tenue de l’enquête publique a été élargie aux 5e et 6e arrondissements par la pose de panneaux d’information”.
La mairie, d’ailleurs, ne s’en cache pas, l’idée était bien de tenir à l’écart d’éventuels opposants au projet : “Il n’est pas envisageable de faire dépendre la régularité d’une enquête publique du bon vouloir de personnes publiques distinctes, qui ne sont pas à l’initiative du projet et pourraient même y être opposées.”
Un périmètre a minima, tout comme la durée de cette enquête publique : à peine un mois, qui plus est à cheval entre juin et juillet, chevauchant le début des vacances scolaires, peu propices à l’expression des habitants.
La mairie parie sur la diminution du nombre de voitures
Les berges de la Seine, rive droite, ce sont 43 000 véhicules par jour, dont, aux heures de pointe du soir, 2 700 véhicules par heure via le tunnel des Tuileries et 2 430/h sous le tunnel Henri IV. Mais, dans les réponses adressées à la commission, le report prévu est bien inférieur : seulement +250 véhicules/heure boulevard Saint-Germain et +640 véhicules/heure quai des Tuileries, les deux voies “les plus impactées”. Pour le reste, la mairie évoque une réduction “prudente” du nombre de voitures qui circuleront.
Même argument pour les questions environnementales. L’étude d’impact indique que, “globalement, le projet améliorera considérablement le cadre de vie des Parisiens” et “permettra d’améliorer la qualité de l’air”. Problème, cette même étude d’impact se base sur un trafic “à vitesse maximale” quand, dans le même temps, elle évoque un ralentissement de la circulation et des temps de parcours allongés. Là encore, c’est la baisse du nombre de voitures qui doit régler le problème.
Des répercussions peu envisagées
Moins de voitures, donc plus de transports en commun sur cette zone ? Cette question de la commission d’enquête s’est une nouvelle fois heurtée à un mur. La mairie s’est bornée à rappeler ses investissements dans le réseau de transports chaque année et a évoqué la restructuration du réseau de bus qui “doit être mise en œuvre à l’été 2018”. Pour rappel, la mairie, selon son propre site Internet, souhaite des “berges rive droite rendues aux piétons pour la rentrée 2016”.
Dernier sujet d’inquiétude, les répercussions économiques pour les commerces des rues qui subiront les reports de circulation. Avec les embouteillages, les commerçants craignent que leur clientèle ne se détourne de leurs établissements. Questionnée sur ce point, la mairie répond en détaillant, pendant près d’une page, comment elle compte améliorer la livraison de ces commerces…
Elle affiche le même mépris lorsque la commission d’enquête fait remonter l’impression de simulacre de consultation ressentie par la population puisque la maire de Paris a d’ores et déjà annoncé que le projet se ferait, quelles que soient les conclusions. Réponse de la mairie : “Il est étonnant que l’on puisse reprocher à la Maire de Paris de vouloir réaliser ce qu’elle a annoncé.” Circulez (ailleurs), il n’y a rien à voir.
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