Aziz Azghane, soupçonné d’être à la tête de la cellule de Daech en Espagne, a-t-il pu avoir accès à des dizaines de milliers de données personnelles concernant notamment le personnel du groupe Air France ? Face à l’inquiétude d’un syndicat, Altedia France assure avoir une politique très stricte sur le traitement des données.
Le Syndicat des naviguants du groupe Air France tire une sonnette d’alarme. Pour ce syndicat repris en 2013 par un groupe d’hôtesses et de stewarts, l’inquiétude est palpable. À la lecture de la presse britannique, espagnole et marocaine, ils apprennent qu’Aziz Zaghnane, directeur du marketing chez Lee Hecht Harison, filiale espagnole du leader mondial des ressources humaines Addeco, était surveillé depuis près de 4 ans par les services espagnols et britanniques avant d’être arrêté en direct à la télévision le 3 mai dernier par la brigade anti-terroriste de Madrid. Ce quarantenaire passé par Vodafone est réputé pour ses talents professionnels de “chasseur de tête”. Il est également suspecté d’être le chef de la cellule de Daesh en Espagne. Interpellé avec trois suspects, dont deux autres ressortissants marocains, l’homme serait à la tête d’une cellule qui diffusait de la propagande djihadiste sur les réseaux sociaux et par messageries instantanées dans le but de recruter. Leur interpellation intervient en raison d’un projet d’attentat dans un centre de vacances de la Costa Del Sol, au sud de l’Espagne.
Une base de données protégées par restriction d’accès ?
Dans le cadre de sa fonction chez Lee Hecht Harison Espagne, Aziz Azghane a eu accès à une gigantesque base de données, qu’il aurait pu utiliser à des fins de propagande ou de recrutement pour le compte de l’Etat Islamique. Sur son compte LinkedIn, le cadre supérieur indique s’être rendu en Syrie en décembre dernier pour de l’humanitaire à travers l’association “Syria Relief”. Après son arrestation, la direction du renseignement de la Guardia civil a confisqué le disque dur de son ordinateur. Le syndicat des naviguants du groupe Air France souligne que la base de données de Lee Hecht Harison est aussi celle d’Altedia, filiale d’Addeco, leader mondial des ressources humaines. Cette gigantesque société est celle à laquelle Air France a fait appel pour gérer les prochains plans de départs volontaires du groupe, précisés en février dernier. Les données de près de 30 000 personnels éligibles au plan de départ d’Air France sont hébergées sur une base de données de la filiale d’Addeco Altedia. Le syndicat souligne que Pôle Emploi et l’entreprise pharmaceutique Sanofi utiliseraient aussi les bases de données fournies par le groupe Adecco via sa filiale.
Les accès sont cloisonnés par pays et par projet”
Inquiets, les salariés informent en conseil d’entreprise toutes les organisations professionnelles d’Air France dans la journée du 18 mai. Pour la filiale Altedia, la France ne serait pas concernée par cette affaire sensible, explique François Moreau, directeur général du service marketing et communication d’Altedia France : “cet ancien salarié de LHH n’a jamais eu accès aux données des personnes accompagnées par Altedia ou en dehors d’Altedia dans le groupe LHH. Deux raisons expliquent cela : la première, c’est qu’il y a une étanchéité entre pays, un consultant en Espagne ne peut accéder aux données d’un projet en France. La deuxième chose, c’est que les consultants qui travaillent sur une mission ne peuvent pas avoir les données de candidats qu’on accompagnent sur une autre mission sur laquelle ils ne sont pas affectés. C’est une affaire qui est sensible, mais la France n’est pas concernée, on parle d’un directeur marketing Espagne. Nous avons une politique très claire sur le traitement des données qui a envisagé des situations et a souhaité cloisonner les accès, à la fois par projet et par pays. Nous avons été en contact avec Air France pour leur expliquer que cette personne, compte-tenu de sa fonction, n’a pas eu accès à la base de données des candidats. Tout comme moi en France je n’ai pas accès à la base de données qui concerne d’autres candidats à l’étranger”. La filiale Altedia France devrait donc tenter de rassurer les salariés et syndicats, mais aussi de répondre à leurs interrogations dès lundi. Le ministère de l’Intérieur a également été informé par une lettre pour réclamer des précisions sur cette affaire.
Publié à 7h33 et mis à jour à 11 heures 51