Selon les analyses indépendantes d’un journaliste américain du Chicago Tribune, l’iPhone 7 émet plus d’ondes que ne le dit Apple. Plusieurs autres appareils concurrents, de marque Samsung ou Motorola notamment, dépassent quant à eux les normes de rayonnement lorsqu’ils sont testés en conditions réelles d’utilisation.
S’il n’a rien d’un tabloïd, le Chicago Tribune a épinglé plusieurs vedettes internationales cet été. De véritables stars planétaires nommées iPhone 7, Samsung S8 ou Motorola E5… qui rayonnent trop fort. Le journaliste Sam Roe, lauréat du prix Pulitzer en 2008 pour une enquête sur la dangerosité de certains jouets, a enquêté pendant un an sur l’exposition du corps humain aux ondes émises par nos chers smartphones. Il a fait réaliser des tests de plusieurs modèles phares dans un laboratoire certifié et indépendant. Des mesures, publiées dans un article daté du 21 août (lire ici), dont les résultats diffèrent de ceux obtenus par la FCC (Federal Communications Commission), l’organisme en charge du contrôle outre-Atlantique. Ces résultats sont aussi différents de ceux présentés par l’Agence national des fréquences radio (ANFR), son homologue français, comme le souligne Marc Arazi, lanceur d’alerte, qui creuse le sujet depuis 2016.
Une première batterie de tests a été effectuée dans selon les critères utilisés par la FCC. C’est à dire à une distance comprise entre 5 et 15 millimètres de la peau – ce sont les industriels qui choisissent (5 millimètres pour Apple par exemple). Dans ces conditions, les résultats des tests sur l’iPhone 7 “l’un des smartphones les plus populaires jamais vendus”, écrit le Chicago Tribune, dépassait les normes américaines. Or, quand on approche le téléphones, forcément, les taux d’ondes reçues par le corps augmentent. Rappelons ici que ces ondes sont émises par les téléphones pour se connecter aux antennes relais. Elles chauffent nos tissus et sont classées comme “cancérogène possible pour l’Homme” par l’OMS, alors que le département de la santé américain a prouvé leur incidence sur l’apparition de tumeurs cardiaques chez les rats.
Normes archaïques
Comme Marc Arazi, le lanceur d’alerte français qui se bat pour obtenir la publication des tests de l’ANFR, Sam Roe comprend mal que les tests soient effectués à plusieurs millimètres du corps, ce qui ne correspond pas à l’usage courant de ces appareils. “Les normes fédérales ne peuvent suffire à protéger le public”, écrit le journaliste, rappelant que les téléphones se transportent aujourd’hui dans la poche et non plus à la ceinture comme cela était le cas dans les années 90, quand ont été instaurés ces normes, archaïques donc. En France, 89% des téléphones testés par l’ANFR dans les conditions réelles d’utilisation, au contact de la peau donc, dépassaient les normes. Mais malgré le combat du lanceur d’alerte Marc Arazi, l’ANFR n’avait pas publié le détail par modèle (lire ici).
Se basant sur l’expérience de Marc Arazi, avec qui il est entré en contact, Sam Roe a donc effectué une seconde batterie de tests, à 2 millimètres de la peau. Dans ces conditions plus proches de l’usage réel, plusieurs téléphones ont explosé les plafonds. L’iPhone 7 affichait des valeurs deux fois supérieures à la norme américaine. Pour l’iPhone 8, c’est trois fois la norme et quatre pour le Motorola E5 Play. Le Samsung Galaxy S8 affichait les taux les plus inquiétants, dépassant cinq fois la norme.
Apple, dont le site LeLanceur.fr avait déjà souligné la dangerosité de l’iPhone 5 (lire ici), a expliqué au Chicago Tribune stipuler à ses clients la nécessité d’utiliser un kit mains-libres pour conserver l’appareil à une distance respectable du corps. Or, cette précision n’apparaît que sur le site web de la firme californienne, comme le note le journal, pas sur la notice de l’appareil – si bien que l’on peut acheter un iPhone sans être informé de cette précaution d’utilisation. Avec 285 millions de smartphones en usage aux Etats-Unis et 29% d’adolescents qui dorment avec leur appareil, ces chiffres qui font craindre un scandale sanitaire. Chez nous, rappelons que 75% des Français et 98% des 18-24 ans possèdent un smartphone.
Deux nouveaux téléphones interdits en France
Dans l’Hexagone justement, deux téléphones interdits cet été. Le Leagoo S8 le Allview X4 soul mini ayant été mesurés au-dessus la norme, l’ANFR a mis en demeure les sociétés fabricantes de “prendre toutes les mesures appropriées pour mettre fin à la non-conformité constatée sur les équipements sur le marché ainsi que ceux déjà commercialisés”. Mais celles-ci n’ont pas donné suite et l’ANFR a “décidé de procéder au retrait et rappel provisoire du marché des deux téléphones concernés”. Pourtant les téléphones étaient toujours commercialisés, sans mise en conformité. Si bien que l’ANFR a demandé à Cédric O, secrétaire d’Etat en charge des communications électroniques de bien vouloir interdire leur commercialisation. Décision actée par un arrêté du 12 juillet.
Quelques semaines plus tôt, deux téléphones Nokia (3 et 6.1) avaient été épinglés avant que le fabricant ne réalise des correctifs de mise en conformité. A l’été 2018, quelque 90.000 modèles d’un téléphone commercialisé par Orange avaient été rappelés (lire ici). L’association 60 millions de consommateurs dressait donc au mois d’août une liste de téléphones épinglés depuis que l’ANFR publie ses mesures. On y retrouve certaines marques dont les modèles figuraient parmi notre classement des plus dangereux en 2017 (voir notre infographie).
Triche
Marc Arazi s’interroge par ailleurs sur les variations des mesures en fonction des tests. En effet, les résultats publiés par le Chicago Tribune ne sont pas les mêmes que ceux des tests de la FCC, eux-mêmes différents des mesures de l’ANFR. “Nous ne comprenons pas ces écarts”, souffle le fondateur de l’association Alerte Phonegate, qui assure avoir de fortes suspicions sur la capacité des industriels à biaiser les tests. “Les fabricants avaient mis en place des logiciels permettant d’interagir sur les appareils au moment des contrôles”, avance-t-il. Aujourd’hui Alerte Phonegate demande que lui soit communiqué les originaux des tests de l’ANFR. L’association devrait être déboutée de sa demande la semaine prochaine. Le conseil d’Etat doit livrer son avis ce 12 septembre à ce sujet après un avis défavorable du Tribunal administratif de Melun et de la Cada.
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