La cour d’appel de Riom a condamné, jeudi 10 novembre, Alberto Verissimo, patron de la société Veriferme, à 6 mois de prison avec sursis et 10.000 euros d’amende pour fausse sous-traitance et pour avoir utilisé une “société écran” afin d’“omettre de déclarer les salariés auprès de l’Urssaf”. Le dirigeant, au cœur d’un système de travail détaché avec le Portugal, voit sa peine alourdie par rapport à celle prononcée en première instance. Il y a quelques mois, un ex-travailleur détaché portugais nous avait raconté son histoire et les difficiles conditions de travail qu’il avait connues dans cette entreprise.
Six mois de prison avec sursis. La décision est tombée jeudi 10 novembre pour Alberto Verissimo. Le gérant de la société Veriferme écope également de 10.000 euros d’amende pour “fausse sous-traitance”.
Une peine alourdie par rapport au jugement de première instance d’octobre 2015, où Albert Verissimo n’avait écopé que de trois mois de prison avec sursis.
M. Verissimo, en plus de Veriferme, était aussi cogérant d’une entreprise portugaise, Tempo Indeterminato. Problème, cette société “n’avait aucune activité au Portugal et a été montée de toutes pièces, pour fournir des salariés détachés “pas chers” en France par le biais de la sous-traitance, essentiellement aux entreprises de M. Verissimo”, explique la CGT.
“Un système qui permet de contourner la législation du travail”
La cour d’appel a reconnu ce que dénonçait la CGT, expliquant que “certains salariés [avaient] été recrutés par Tempo Indeterminato dans le but d’être détachés en France”, y voyant le “recours à une fausse sous-traitance” ayant pour but de “réaliser des économies sur la masse salariale”.
C’est ce mécanisme qui a été condamné par le tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand et confirmé par la cour d’appel de Riom. “L’union syndicale CGT de la construction s’était constituée partie civile, le préjudice de la profession a été reconnu”, ajoute le syndicat.
“Ces actes doivent être rigoureusement sanctionnés, a poursuivi la cour d’appel de Riom. M. Verissimo Alberto, au moyen d’une fausse sous-traitance, a mis en place un système lui permettant de contourner la législation du travail au profit de l’entreprise qu’il gérait et s’est consciemment placé hors la loi aux fins d’en tirer des bénéfices illicites.”
“Si les punitions étaient plus lourdes, il y aurait moins d’abus”
Les pratiques douteuses, donc reconnues illégales, de la société Veriferme avaient été racontées au Lanceur par Porfirio Francisco da Silva Couras, électricien portugais embauché en 2012 par l’agence d’intérim Tempo Indeterminado puis envoyé en France pour travailler dans des entreprises françaises, dont Veriferme.
Il nous avait confirmé que “Tempo Indeterminado recrutait pour les entreprises de la région de Clermont-Ferrand, faisant travailler ces ouvriers “entre 60 et 70 heures par semaine””. À l’époque, il trouvait le jugement de première instance trop clément : “Si les punitions étaient plus lourdes, il y aurait moins d’abus.”
“Maintenant, l’Urssaf va pouvoir se retourner contre lui”
Pas sûr que la peine prononcée par la cour d’appel change la vision de M. Da Silva Couras. “On peut être surpris de la faiblesse de la condamnation et des amendes, mais l’essentiel est qu’il soit condamné”, estime pour sa part René de Froment, du syndicat CGT Construction Allier/Puy-de-Dôme, car “maintenant l’Urssaf va pouvoir se retourner contre lui et exiger les cotisations sociales non perçues, ce qui peut aller jusqu’au million d’euros. On voulait que ce soit dissuasif, je pense que ça l’est et que ça fera réfléchir, au moins localement, les employeurs qui envisagent de se lancer dans de telles pratiques”.
Le syndicat entend profiter de cette décision pour s’attaquer au problème du travail détaché, appelant le Gouvernement à prendre des mesures fortes, notamment “une politique de contrôle, avec le renforcement des effectifs de l’inspection du travail et des sanctions à l’égard des donneurs d’ordre”.