Sitôt connue l’annonce de la vente de Numéro 23 au groupe Next Radio TV d’Alain Weill, Catherine Morin-Desailly, présidente (UC) de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication au Sénat, dégaine son amendement jambe de bois. Elle propose ainsi d’augmenter à l’avenir les taxes en cas de revente d’une chaîne TNT. Et organise demain au palais du Luxembourg une “table ronde sur la radio” en présence de tous les patrons de stations, dont Alain Weill (RMC, BFM). Mais Sud Radio n’est pas invitée.
Ils seront tous présents pour “échanger sur la radio” : tous les patrons de stations privées, généralistes et nationales (catégorie E, à laquelle appartiennent Sud Radio, RMC, Europe 1 et RTL), les représentants des syndicats professionnels, Patrice Gélinet, membre du CSA chargé de la radio, la presse et le public étant même cordialement invités.
Tous ? Non. Sud Radio (qui, comme Lyon Capitale, appartient à Fiducial Médias) n’aura pas droit à la parole. Et pour cause : nous avions dénoncé ce futur scandale dès l’attribution de la chaîne par le CSA en 2012, dans le cadre d’un appel à candidatures complètement truqué. À l’époque, nous avions alerté sur le “péché originel” de Numéro 23, ressource publique gratuite, uniquement attribuée et conçue pour être rapidement revendue, avec toute une chaîne de complicités, y compris au sommet de l’État.
Une fois encore, nous sommes dans le double langage politique. Après la ministre de la Culture, Fleur Pellerin, qui faisait mine de s’offusquer à propos de cette revente (et venait juste de faire son vendeur, Pascal Houzelot, chevalier des Arts et des Lettres !), voilà que l’élue centriste, qui elle aussi, en séance publique au Sénat, se disait scandalisée par l’affaire, vient d’inviter à son colloque le second contractant, en l’occurrence Alain Weill.
De l’intérêt d’une table ronde…
Il m’avait toujours semblé que l’intérêt principal d’une table ronde était d’aborder les sujets sous divers angles, afin que le public puisse, argument contre argument, se forger une opinion éclairée. Eh bien non : après les projets de loi mal rédigés parce que votés dans l’urgence et sous l’émotion de faits divers, après les amendements a posteriori censés régler les problèmes du présent par des hypothèques sur l’avenir, voici les nouveaux débats : ceux où tout le monde est d’accord et dans lesquels on n’aborde pas les questions qui fâchent. “Prenez un cercle, caressez-le, il deviendra vicieux !” écrivait Ionesco. Quelle meilleure définition pour la table ronde sénatoriale ?
Programme de travailCommission de la culture, de l’éducation et de la communication du SénatMercredi 13 mai 2015 – À 9h30, salle MédicisTable ronde, ouverte au public et à la presse, sur la radio, en présence de :– M. Patrice Gélinet, membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA)– M. Michel Cacouault, président du Bureau de la radio, accompagné de MM. Christopher Baldelli, président du directoire de RTL, Jean-Paul Baudecroux, président du directoire de NRJ Group, Denis Olivennes, président directeur-général de Lagardère Active, et Alain Weill, président-directeur général de Next Radio TV– M. Philippe Gault, président du Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (SIRTI), accompagné de MM. Mathieu Quétel, vice-président, et Tarek Mami, secrétaire national– M. Emmanuel Boutterin, président du Syndicat national des radios libres– M. Pierre Bellanger, président de Skyrock.Cette table ronde fera l’objet d’une captation vidéo. |
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